Ces cinq dernières années je vous avait habitué à légender chaque photo du projet 52 par le récit d'un événement personnel ou d'un procédé de composition. Cette année je m'abstiens volontairement de réitérer ce processus et préfère vous écrire un texte d'introduction et de mise en contexte. 
L'année 2022 a été la plus complexe de ma vie. Je me trouve aujourd'hui à son dernier jour dans une phase de ma vie délicate, confrontante et incertaine. Les événements se sont enchaînés pour moi du 1er janvier au 31 décembre comme un effet domino, de ces descentes dont on entend parler lorsque quelqu'un explique comment il a tout perdu, s'est retrouvé à la rue et dont on se dit qu'il est tout de même malaisé d'avoir tout et de se retrouver avec rien ou presque, et pourtant.

2022 aura été l'année de la perte pour moi et de l'apprentissage de la solitude. Dépression, burn out, pertes familiales rapprochées, amicales, professionnelles, associatives, deuils, le tout sur fond de bataille pour le handicap que je vis en tant que mère chaque jour, la majorité de ces pertes y étant liées, ma vie ne ressemble plus en rien à ce qu'elle était en janvier.
Les événements se sont enchainés sans que je puisse retrouver la paix entre eux, sans pouvoir retrouver mon souffle, ont creusé des terrains favorables au sabotage par autrui et par moi-même et ont illustré l'impitoyable loi des séries et du manque d'indulgence que l'on se porte à soi et entre nous. Aussi devant cette annus horribilis, je n'ai pas souhaité entrer dans les détails de ce projet 52. Si je prends la parole librement aujourd'hui, c'est que ce projet a toujours eu une vocation thérapeutique, est teinté des événements qui parsèment ma vie et surtout me sert à maintenir un cap et une ambition personnelle qui me pousse à l'extérieur.

L'extérieur, "le dehors" comme je l'appelle, la nature, mon environnement, mon oxygène a sans doute été le point de reliance entre ma créativité, ma détresse et ma combativité. Sans les paysages que vous découvrez ou redécouvrez sur les photos, point de vie, point de souffle. Plus qu'aucune autre année, celle ci a forgé un lien fusionnel entre mon esprit et la nature, m'a fait parcourir 20 départements, marché 260km, roulé plus de 50.000, pris des dizaines de milliers de clichés, travaillé la photographie animalière, mise en relation avec quelques merveilleux animaux, m'a permis de fouler des sols inconnus, de dormir des dizaines de nuits dans ma tente, en camion, dans des gites, de rencontrer beaucoup de monde.

Cette connexion et ses illustrations multiples de résilience m'ont permis de mener ce projet 52 jusqu'au bout alors qu'il aurait été facile de l'abandonner et de céder à l'à quoi bon. Toucher l'effort, grimper, souffrir physiquement, chercher le spectaculaire, le froid, la chaleur, me baigner dans des fleuves au cœur de l'hiver, gravir des sommets, attendre les vautours, j'ai dépassé mes limites physiques et souvent la démarche était plus importante que la photo finale. Vous verrez des photographies prises dans des conditions m'ayant demandé beaucoup de ressources mais ce sont ces conditions qui ont permis à ma santé de se maintenir et à mon espoir de se conserver. Je crois beaucoup à l'art comme exutoire et à l'effort comme moteur. 
J'ai appris cette année à compter sur moi, à apprivoiser la pire de mes craintes, l'abandon, et à éprouver la solidité de mes pas et de mes décisions. 

A l'heure actuelle, je maintiens le projet 52 en 2023. Voir son évolution sur toutes ces années est également formateur et m'a fait créer des séries dont je suis très satisfaite après des années de tâtonnement. Elles n'auraient pas été possibles sans ce but à atteindre, ce fil artistique directeur qui me guide depuis maintenant des années. Cette année chaque autoportrait ou presque a été accompagné de sa série complète, ce ne sont donc pas 52 autoportraits que j'ai réalisé mais plus de 500. Ces images inédites se trouvent toutes sur mon compte Patreon. 
Les contributeurs Patreon m'ont permis cette année de voyager, de m'offrir des nuits de camping ou de gite et surtout de remplacer mon reflex par un appareil photo hybride à partir du mois d'octobre, l'un de mes meilleurs choix en terme de matériel depuis le début de ma carrière il y a douze ans. Sans leur soutien, rien n'aurait été possible car j'ai décidé de mettre fin à toutes mes autres activités rémunératrices par soucis de santé durant le printemps 2022. Le financement Patreon m'a donc été indispensable et j'en remercie encore profondément les personnes qui ont dépensé leur argent à cette fin, des plus petites contributions aux plus généreuses. 
Je vous laisse avec les photos, vous pourrez me laisser un mot d'appréciation en story Instagram si le coeur vous en dit ! 
Merci de m'avoir lue, bon visionnage ! 

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